Accueil Culture Hommage à Philippe Barrière : Un esthète nous a quittés

Hommage à Philippe Barrière : Un esthète nous a quittés

Le décès brutal de Philippe Barrière, grand architecte, urbaniste, critique et historien d’art, mais aussi esthète et amoureux de la Tunisie, a résonné comme une onde de choc auprès de ses proches, comme de ses collègues et étudiants. Ce départ rapide et discret n’est pas sans rappeler, bien involontairement, sa personnalité modeste, qui dissimulait un parcours exceptionnel et un océan de savoir, mis depuis quelques années au service d’une Tunisie secouée par les affres post-révolutionnaires. Un petit pays qu’il rêvait pluriel, éclatant et à la pointe de l’innovation architecturale.

Philippe Barrière était bardé de diplômes en architecture mais aussi en urbanisme et en design. Il avait passé un Doctorat d’histoire de l’art à la Sorbonne et obtenu un diplôme aux USA. Il avait mené de nombreux projets dans différents pays (Etats-Unis, Dubaï, Palestine, Kenya, Argentine, Canada, etc.) et reçu de nombreux prix. Il n’en parlait guère, par pudeur ou par modestie, mais les articles qui lui ont été consacrés vantent «son intelligence, sa rigueur et sa précision» (Odile Decq, architecte de renom). Philippe Barrière a écrit lui-même bon nombre d’articles dans des revues internationales et a publié un livre essentiel sur ses conceptions en matière d’architecture. : Résolution. Ses préoccupations étaient à la fois esthétiques et humanistes. Il s’agissait pour lui de réconcilier l’homme et la nature, de réinscrire l’homme dans son environnement. Selon Peter Bran, grand architecte américain, «Philippe Barrière considère l’architecture comme un outil de changement social, culturel et environnemental».

Philippe Barrière était tombé amoureux de la Tunisie en venant y donner des cours et avait décidé de s’y installer il y a une dizaine d’années. L’amour de ce pays était peut-être lié au souvenir de ses années de jeunesse au Maroc. Depuis lors, ce «magicien des édifices» s’était bâti une solide réputation à l’échelle locale. Ses derniers projets concernaient un complexe de vie rurale commandé par le gouvernorat de La Manouba : «La Colline aux Oliviers» et un espace hôtelier très végétalisé à Gammarth, le «Domaine de l’anse sauvage». Ces projets d’avant-garde ont été conçus par son agence internationale, Philippe Barrière Collective. Il associait à son travail plusieurs de ses anciens élèves. Ce serait profondément dommage que ces  travaux remarquables et aboutis ne se concrétisent pas, malgré l’absence du Maître et les difficultés conjoncturelles.

Cependant, la valeur professionnelle et l’envergure internationale de Philippe (saluées par la Médaille des Arts et Lettres) n’avaient d’égales que sa simplicité, sa bienveillance et sa générosité. Sa présence même était apaisante et réconfortante auprès de celles et ceux qui l’ont croisé. L’architecte américain Michael Sorkin écrivait avec justesse à son propos : «Philippe Barrière arpente avec une résolution douce et élégante le champ de la vie ponctuant l’environnement d’instants d’une précision brillante et mystérieuse.» Ce sont ces instants qui nous manqueront cruellement.

Pour rendre hommage à cet homme talentueux, à cet ami précieux, une cérémonie sera organisée à La Goulette au cours du mois d’octobre, afin de réunir tous ceux qui l’ont connu et ne l’oublieront pas.


Haïthem HAOUEL
Maryvonne RADIX-MARTIN

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